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© Yves Jacq |
Nous sommes le 13 juin
1886. Dans un grand journal, Le Gil Blas,
où des écrivains connus comme Maupassant collaboraient, était annoncée une
mince plaquette de poésie avec une préface de Jean Richepin que le journal
publiait. Le tirage, luxueux, en papier japon, comportait 500 exemplaires. Il s’agissait d’un poème
d’Izambard intitulé : Collage. Par
une sorte de coïncidence, c’est exactement au même moment qu’une revue assez
confidentielle, La Vogue, publiait Les Illuminations d’Arthur Rimbaud.
À
cette époque, Izambard ne soupçonnait pas une seconde que son ancien élève
était un grand poète. Certes, il avait bien rencontré Verlaine l’année
précédente et lui avait communiqué des
manuscrits de l’année 1870 que lui avait confiés l’auteur d’À la Musique. Mais, il ne recherchait
pas, à ce moment, les trésors qu’il possédait comme la lettre du Voyant que
Rimbaud lui avait envoyée le 13 mai 1871. Pourtant, cette lettre, il ne l’avait
pas oubliée, mais elle lui avait tellement déplu qu’il ne la publia que 42 ans
plus tard ! En effet, Rimbaud s’était permis de lui dire, sans aucun
ménagement, que sa poésie serait toujours horriblement fadasse et qu’il
finirait comme un satisfait qui n’a rien fait ! L’auteur du Bateau ivre avait fait publier, lui
aussi, 13 ans avant Collage, un chef-d’œuvre
en une mince plaquette tirée elle aussi à 500 exemplaires mais sur papier
ordinaire. On sait qu’il ne put y avoir d’écho dans la presse, car aucun livre
ne pouvait être vendu, dans la mesure où ils étaient restés chez l’imprimeur à
l’exception de quelques exemplaires d’auteur dont l’un fut communiqué à
Richepin (qu’est-il devenu ?). Quelques mois après l’annonce du livre
d’Izambard Une Saison en enfer
paraissait dans La Vogue. Aujourd’hui
la plaquette d’Izambard est beaucoup plus difficile à trouver que l’édition
originale de la Saison et il est
permis de penser que le nombre de ceux qui ont lu Collage, en notre temps, est proche de zéro. Il n’est donc pas
inutile d’en révéler quelques extraits.
Que valait la poésie d’Izambard en
1886 ? Rimbaud avait-il fait une juste prédiction ? Le livre
d’Izambard en dépit de son annonce dans Le
Gil Blas n’eut aucune réception
critique et aucun succès selon l’aveu même de l’ancien professeur. Cependant, à
la fin de sa vie, en 1930, dans une de ses dernières lettres, il souhaitait
qu’une réédition de son poème Collage
fût réalisée pour que l’on sache enfin qu’il était poète, lui aussi ! Nous
offrons aux lecteurs le soin de lire quelques pages qui lui permettront de
constater que Rimbaud n’avait peut-être pas tout à fait tort dans son jugement.
Je remercie vivement Yves Jacq de m’avoir communiqué et autorisé à publier des
images de son livre rarissime.
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