Dans l’édition des oeuvres complètes de Rimbaud dont le texte avait été établi et annoté par Rolland de Renéville et Jules Mouquet en 1946, on peut lire dans les brouillons de La Saison la phrase :
« j’avais été damné par l’arc-en-ciel et les magies religieuses. »
Les éditeurs nous précisent qu’ils ont reproduit le texte de l’édition critique d’Une Saison en enfer par Bouillane de Lacoste.
Dans son édition critique, Bouillane de Lacoste écrit bien cette phrase.
L’édition d’Antoine Adam de 1972 reproduit aussi la leçon de Bouillane.
La nouvelle édition des oeuvres de Rimbaud établie par Suzanne Bernard et André Guyaux en 2000 précise par une note d’André Guyaux : « le texte de ces brouillons a été revu sur les manuscrits, que M. Jacques Guerrin m’a permis de consulter et qui ont, depuis lors, été acquis par la Bibliothèque nationale (vente du 17 novembre 1998) . »
Cependant cette édition reproduit la phrase : « J’avais été damné par l’arc-en-ciel et les magies religieuses », en précisant que le mot magies surcharge un autre mot.
Il a fallu attendre 2009 pour avoir la bonne lecture. Dans sa remarquable communication « L’atelier d’Une saison en enfer. Étude des brouillons. » (publiée dans : Études réunies par André Guyaux , Rimbaud, des Poésies à la Saison, Paris, éditions Classiques Garnier, 2009) Aurélia Cervoni a pu rétablir la phrase « J’avais été damné par l’arc-en-ciel et les féeries religieuses » le mot magies ayant été barré par Rimbaud.
Dans la version imprimée, Rimbaud n’a conservé que la phrase : « J’avais été damné par l’arc-en-ciel. » ce qui permet à Aurélia Cervoni d’expliquer finement la raison de cette suppression.
Mais ce n’est pas tout !
Aurélia Cervoni nous réserve une surprise en indiquant que le terme féeries avait été déchiffré correctement par Isabelle Rimbaud « Rimbaud mystique. Les Illuminations et la Chasse spirituelle, Le Mercure de France, 16 juin 1914, p.708 et Paterne Berrichon, « Ébauches d’Une saison en enfer d’Arthur Rimbaud », La Nouvelle Revue française, 1er août 1914, p.244, n.3
Il aura donc fallu 95 ans pour savoir qu’Isabelle Rimbaud et Paterne Berrichon avaient fait une meilleure lecture du manuscrit des brouillons de La Saison que Bouillane de Lacoste. Pourtant, il avait bien lu l’article de Berrichon qu’il avait corrigé minutieusement, mais il n'avait pas conservé la bonne lecture de féeries !
Merci.
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