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À partir des éléments de cette lettre nous allons essayer de reconstituer ce qu’il s’est passé le 30 septembre 1871 au dîner des Vilains bonshommes. Valade nous dit que Rimbaud avait une figure absolument enfantine qui pourrait convenir à un enfant de 13 ans. C’est donc le portrait de la première photo de Carjat qui correspond à cette date.
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Valade nous dit qu’il a eu trois semaines de réflexions pour exprimer son enthousiasme. Comme sa lettre est du 5 octobre, sa réflexion date du 15 septembre environ. Or Rimbaud est arrivé à Paris vers le 10 septembre. On comprend que Verlaine a présenté rapidement son protégé à Valade. Sans doute Verlaine lui a montré des vers et d’ailleurs nous savons que Rimbaud lui a donné Oraison du soir.
Que savons-nous des vers que Rimbaud a lus aux convives du dîner ? On a longtemps cru que notre poète avait lu le Bateau ivre. On se basait sur le témoignage de Delahaye, mais la critique récente ne le pense plus avec de sérieux arguments.
Quels vers Rimbaud a-t-il lus au dîner des vilains bonshommes ?
On peut faire des hypothèses. Vraisemblablement, Verlaine et Valade ont conseillé leur jeune protégé.
Il semble que Oraison du soir soit un bon candidat. Il avait beaucoup plu au public quand Verlaine l’avait révélé dans les Poètes maudits en 1884.
Ensuite, on peut aussi penser aux Assis, mais quel poème peut correspondre aux « corruptions inouïes » ? Le seul possible est le Sonnet du trou du cul. Cependant on peut douter que Rimbaud l’ait lu d’autant plus que Verlaine y avait participé. Valade a dû le connaître auparavant car il était connu des amis de Verlaine.
Si Rimbaud a « terrifié » son auditoire et s’il est apparu comme un diable c’est qu’il a dû exprimer ses idées sur la voyance et expliquer qu’il pratiquait le dérèglement de tous les sens. Voilà de quoi en effet inquiéter son auditoire!
Mise à jour du 7 août :
La lettre de Valade fut révélée en 1905 par Émile Blémont. Il avait été décidé à cette époque d’élever une statue à Bordeaux en hommage à Valade. À cette occasion Blémont relut les lettres de Valade qu’il avait conservées et retrouva la lettre fameuse qui concernait Rimbaud. Il l’a confiée à Albert Desvallois qui la publia en 1905 dans (cliquer sur le lien) : Le penseur
La statue fut inaugurée en 1906 à Bordeaux
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Mise à jour du 9 août :
Voici les trois témoins de Rimbaud cités dans la lettre :
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Ernest d'Hervilly. DR. |
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Edmond Maître. DR. |
Soury, d'Hervilly, Maître sont morts respectivement en 1915,1898,1911. À cette époque l'oeuvre de Rimbaud était bien connue. On peut regretter que ces témoins n'aient pas publié de souvenirs sur Rimbaud.
Mise à jour du 13 août
Lettre importante de Léon Valade à Jules Claretie du 9 octobre1871 signalée dans les commentaires :
«Pour augmenter vos remords de n'avoir point assisté au dernier dîner des Vilains Bonshommes, je veux vous apprendre qu'on y a vu et entendu pour la première fois un petit bonhomme de 17 ans, dont la figure presque enfantine en annonce à peine 14, et qui est le plus effrayant exemple de précocité mûre que nous ayons jamais vu. Arthur Rimbaud, retenez ce nom qui (à moins que la destinée ne lui fasse tomber une pierre sur la tête), sera celui d'un grand poète. «Jésus au milieu des docteurs», a dit d'Hervilly. Un autre a dit : C'est le diable ! – ce qui m'a conduit à cette formule meilleure et nouvelle : le diable au milieu des docteurs…»
Il faut préciser que Théodore de Banville avait présidé la séance du 30 septembre 1871.
On peut lire l’article de David Ducoffre