dimanche 15 septembre 2019

Note sur la « rose d’eau » de Fleurs (Illuminations) Par Olivier Bivort

Nénuphar blanc. DR.



La « rose d’eau » mentionnée par Rimbaud dans Fleurs (Illuminations) a suscité de nombreux commentaires, fondés la plupart sur l’inventivité du poète en matière de botanique : il s’agit d’« un terme inventé par Rimbaud » écrit Cecil Hackett, (Rimbaud, Œuvres poétiques, Imprimerie nationale, 1986, p. 349),  « cette fleur n’existe pas », selon Louis Forestier (Rimbaud, Œuvres complètes, Laffont, « Bouquins », 1992, p. 516), et, pour Pierre Brunel, « il est […[ important que le centre de l’évocation soit, non une fleur réelle, […], une fleur qui n’existe pas en dehors de la flore rimbaldienne » (Rimbaud, Une saison en enfer, Illuminations, Le Livre de poche, « Classique », 1998, p. 124). Dans une note publiée dans Parade sauvage en 1986, Christian Pagès avait fait état d’un germanisme, en l’occurrence un calque de l’allemand wasserrose, « un des appellatifs du nénuphar (Mummel) », hypothèse reprise par André Guyaux dans la récente édition des Œuvres complètes de la « Bibliothèque de la Pléiade » (Gallimard, 2009, p. 968).  Il est vrai que, dès 1960, Suzanne Bernard s’était demandée si la « rose d’eau » n’était pas un nénuphar, en se fondant sur un passage d’Atala où Chateaubriand décrivait des « îles flottantes de pistia et de nénuphars, dont les roses jaunes s’élèvent comme de petits pavillons » (Rimbaud, Œuvres, Classiques Garnier, 1960, p. 511 ; mais la citation a disparu des éditions successives). Son intuition était juste, mais ni Chateaubriand, ni par ailleurs la langue allemande, n’avaient fourni à Rimbaud cette curieuse appellation. Comme le mentionne Édouard Spach dans son Histoire naturelle des végétaux (t. 7: Phanérogames, Paris, Roret, 1839, p. 17), la rose d’eau était le nom courant, en France, du nymphéa commun ou nénuphar blanc (nymphoea alba) : 


On en trouvera confirmation dans les ouvrages de Jean-Louis Plonquet (Essai sur la topographie médicale du canton d'Ay (Marne), t. 1, 1855, p. 79) et de M. J. Macquart, (« Plantes herbacées d’Europe et leurs insectes, pour faire suite aux arbres, arbrisseaux, etc. », dans Mémoires de la Société impériale des sciences, de l'agriculture et des arts de Lille, Lille-Paris, 2e série, vol. 1, 1855, p. 230 : « Les noms vulgaire du Nymphéa blanc sont la Rose d’eau, le Lys des étangs »), tous deux consacrés à la description de la flore du Nord de la France (Nord et Champagne). 

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