vendredi 8 septembre 2017

La grammaire de Rimbaud et Walter Scott, par Jacques Bienvenu


Collection Jacques Bienvenu.DR.

On se souvient que dans la grammaire qu'il a annotée, Rimbaud a écrit une maxime au-dessus de celle de son père : 

Pensez tout ce que vous voudrez 
Mais songez bien à ce que vous direz !

Rimbaud n'a pas inventé cette maxime : elle se trouve textuellement dans un roman de Walter Scott intitulé La jolie fille de Perth.




La question que je me suis posée est : dans quelle édition Rimbaud a-t-il lu cet ouvrage ? Ce qui est sûr c'est qu'il la lue dans une traduction de Defauconpret. En effet, dans l'édition de 1855 traduite par La Bédollière on trouve une autre maxime : A ta langue au besoin sache mettre une entrave,/Car la pensée est libre et la parole esclave.

En recherchant d'autres éditions de Walter Scott avec comme traducteur Defauconpret j'ai trouvé celle-ci :


Il me semble que cette édition de 1868 est un bon candidat pour la lecture de Rimbaud. Elle comporte deux récits Le châteu périlleux et De la Démonologie qui pourraient avoir nourri le poète. De la Démonologie surtout est un récit historique qui me semble le plus intéressant, car plusieurs thèmes de Rimbaud y sont abordés. Du moins, on pourra rajouter Walter Scott aux lectures de Rimbaud et Eddy Breuil pourra le rajouter à la liste qu'il a donnée dans une nouvelle édition  du Dictionnaire Rimbaud.

En découvrant ce petit intertexte de Rimbaud, je ne peux m'empêcher de penser à un récit peu connu de Georges Perec : Le Voyage d’hiver. J’en  rappelle le sujet : un jeune professeur de lettres qui prépare une thèse sur l'évolution de la poésie française des Parnassiens aux Symbolistes découvre dans une bibliothèque un livre d’un mystérieux écrivain qui comporte mot pour mot des fragments des auteurs qu'il étudie, en particulier de Rimbaud. Il s'aperçoit avec stupeur que l'édition du livre est antérieure aux publications de ces auteurs. Il se dégage l'amusante notion de plagiaire par anticipation. Les membres de l'Oulipo dont Perec faisait partie sont à l'origine du plagiat par anticipation. Certains membres étaient des mathématiciens comme Raymond Queneau, Jacques Roubaud, François Le Lyonnais. À noter que Jacques Roubaud est l'auteur d'une étude révolutionnaire sur la métrique de Rimbaud : La vieillesse d'Alexandre toujours mal comprise. Ne pas confondre Jacques Roubaud avec son avatar Cor-nul-ier. Lucien Chovet qui a publié sur ce blog avait mentionné dans le titre de son article d'Histoires littéraires : « Marceline Desbordes-Valmore, plagiaire par anticipation de Rimbaud ». 

Pour en revenir à l'intertexte que j'ai découvert, il est trop tôt pour juger de son importance. Il faut d’ailleurs être prudent avec les intertextes que l’on trouve dans l’oeuvre de Rimbaud.Toutefois J’ai la faiblesse de penser que celui que  j'ai proposé pour « splendeurs invisibles » me semble pertinent.

Je n'ai pas tout dit sur la grammaire de Rimbaud et ce sera l'objet de mon prochain article. Je reviendrai ensuite sur le dossier Solde. Le lecteur qui suit  mon blog avec bienveillance comprendra que mon travail de recherche depuis le onze juillet présente une certaine discontinuité au fil de mes découvertes. 

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