Pour les chrétiens, le jour de la Pentecôte, les apôtres réunis en un cénacle reçoivent sous la forme d’une langue de feu la connaissance de toutes les langues qui leur permet d’annoncer la bonne nouvelle de la venue du Christ à tous les peuples.
À la fin de son activité poétique, il semble que Rimbaud ait reçu lui aussi une langue de feu qui l’invitait à se lancer dans l’étude de toutes sortes de langues étrangères au français. Cela commença par l’allemand. C’est en Écosse en 1874 que Rimbaud écrivit des listes de mots allemands. À son retour il déposa, à Paris, ces liste de mots chez la mère de Verlaine avec le dossier des Illuminations qui comprenait aussi des poèmes en vers. La transmission du dossier n’a pas eu lieu à Stuttgart contrairement à un unique témoignage tardif et suspect de Verlaine, j’y reviendrai. Après l’allemand c’est l’italien avec le passage à Milan, puis arrivé à Marseille il songea à l’espagnol qu’il avait peut-être étudié avant. Un témoignage le décrit apprenant le russe. On sait qu’arrivé à Aden puis en Afrique il se lancera dans une étude approfondie de l’arabe et il étudiera aussi tous les dialectes qui lui permettront de faire son commerce. Les explorateurs Borelli et Bricchetti le décrivent comme un parfait polyglotte.
Il n’est plus question de poésie à ce moment.
Comme une réponse à cet abandon de la poésie pour l’apprentissage des langues étrangères, Le Bateau ivre vient d’être traduit en 28 langues et dialectes par des poètes de toute nationalité comme on peut le voir actuellement à l’exposition de Mons que je viens de signaler.