mercredi 23 décembre 2020

Rimbaud et Jacoby


Émile Jacoby est connu pour avoir créé un journal « Le Progrès des Ardennes » dans lequel Rimbaud avait publié sous le pseudonyme de Jean Baudry un article intitulé « Le Rêve de Bismarck » en novembre 1870. De plus Rimbaud fut employé dans ce journal en avril 1871 pour y dépouiller la correspondance. Jacoby est mort l’année suivante à Charleville le 25 juin 1872 comme le montre son acte de décès que j’ai consulté.


Jacoby était aussi photographe à Charleville. Il se trouve que Rimbaud logeait à côté de lui. Jacoby avait son atelier situé au 22 rue Forest et Rimbaud habitait au 20 de la même rue depuis 1866. C’est pour cette raison que des biographes comme Jean-Jacques Lefrère ont pensé que la photographie de première communion des deux frères Rimbaud avait été prise par Jacoby car la première communion de Rimbaud avait eu lieu en mai 1866.


DR. BNF.

Cependant cette attribution a été contestée par Jacques Desse qui l’attribue au photographe Eugène Vassogne. Certains ont été convaincus par cette attribution comme Alain Bardel et David Le Bailly. L’argument principal de Desse repose sur le tapis de sol de la photo de première communion qui serait caractéristique des photographies de Vassogne. Mais l’image qu’il donne pour illustrer son propos n’est pas convaincante car les dessins géométriques ne sont pas identiques. Pour ma part je pense que Jacoby qui habitait à côté de Rimbaud en 1866 est un candidat plus naturel comme photographe.


Vassogne est l’auteur d’un portrait de Vitalie la sœur du poète. Sur cette photo Vitalie a au moins 15 ans. Jacoby était décédé à ce moment là ce qui explique que Madame Rimbaud n’avait pu retourner chez lui.


DR. Musée Rimbaud.
Daté de 1874 par Claude Jeancolas

Jacoby était un passionné de photographie qui écrivait souvent à la Société française de Photographie où il fut admis en 1868. Le grand format et l’excellente qualité du portrait de première communion plaident en faveur de Jacoby.



Avant son arrivée à Charleville Jacoby, qui était instituteur, avait dirigé un établissement d’éducation à Tours et avait découvert vers 1839 un calculateur prodige, jeune pâtre illettré du nom d’Henri Mondeux. Son père l’avait confié à Jacoby qui publia plusieurs monographies sur ce pâtre et l’avait présenté à des savants mathématiciens. Grâce à Jacoby,  Mondeux devint célèbre en son temps. Le traité d’arithmétique publié par Jacoby montre qu’il était bien informé en mathématiques. 

DR. BNF.

Jacoby savait que Rimbaud écrivait des poèmes mais il ne l’a pas, semble-t-il, considéré comme un poète prodige. La femme de Jacoby écrivait des poèmes. Peut-être appréciait-elle ceux de Rimbaud ? On pense que Jacoby avait pu publier Le Dormeur du val en 1870. En tout cas Rimbaud avait toutes les raisons d’apprécier Jacoby qui était ouvertement favorable à la Commune et qui ne s’en cachait pas dans son journal qui fut d’ailleurs censuré par les autorités françaises en 1871. On ne connaît de Jacoby que le portrait qu’en a donné Delahaye : un homme chauve avec une grande barbe blanche. Ajoutons pour conclure que quand il est mort à Charleville il avait 58 ans et sa femme 35 ans. 

Je remercie François Boisjoly pour m’avoir aimablement communiqué ses images des photographies de Jacoby ainsi qu’Hervé Lestang qui m’a donné des informations sur la biographie d’Eugène Vassogne.




mardi 22 décembre 2020

Rimbaud sur France Inter du lundi 21 décembre au jeudi 24 décembre

L'heure Bleue

France Inter du lundi 21 au jeudi 24 de 20H à 21H par Laure Adler

Lundi 21 : Alain Borer

Mardi 22: Yves Bonnefoy (archive 1966) et Pierre Michon

Mercredi 23 :  Patti Smith

Jeudi 24 : Alain Borer, Ernest Pignon-Ernest et Jean-luc Barré

dimanche 13 décembre 2020

Une information probable de Rimbaud publié dans le journal "Le Temps"

Nous avons vu que pendant son séjour au Caire Rimbaud envisageait une carrière de journaliste. Il avait écrit à Paul Bourde pour lui proposer des articles pour Le Temps. Le jeudi 15 décembre 1887 il écrivait à sa famille :

«  J’ai envoyé des articles au Temps, Figaro etc … »


Jean Voellmy qui avait publié la correspondance de Rimbaud à Ilg a suggéré que Rimbaud avait pu envoyer au Temps une information. (Parade Sauvage 11, p.143). Voici cet entrefilet publié dans le Temps du 23 octobre 1887 :



On peut renforcer l’hypothèse de Jean Voelmy. On voit que Rimbaud dans cet entrefilet dénonce le Sultan de Zeilah Abu Baker, ce qui correspond à ce qu’écrivait Rimbaud à son sujet peu de temps après cet entrefilet, le 9 novembre 1887, dans une lettre à Emile de Gaspary :  


« Les ennemis les plus dangereux des Européens en toutes ces occasions sont les Abou Beker, par la facilité qu’ils ont d’approcher l’azzaze et le Roi, pour nous calomnier, dénigrer nos manières, pervertir nos intentions. Aux Bédouins dankalis ils donnent effrontément l’exemple du vol, les conseils d’assassinat et de pillage. L’impunité leur est assurée en tout par l’autorité abyssine, et par l’autorité européenne sur les côtes qu’ils dupent grossièrement l’une et l’autre. Il y a même des Français au Choa qui, pillés en route par Mohamed, et à présent encore en butte à toutes ses intrigues, vous disent néanmoins «  Mohamed c’est un bon garçon! »- Mais les quelques Européens au Choa et au Harar qui connaissent  les mœurs et la politique de ces gens, exécrés par toutes les tribus Issa Dankali, par les Galla et les Hamara, fuient leur approche comme la peste. »


Voici une photographie inédite de ce fameux Abou Beker protégé par le gouvernement français de l’époque : 


DR. Collection J.B.