mercredi 24 février 2021

Histoire de la découverte d'une lettre de Rimbaud

CADN archives. DR.

La lettre du mercredi 12 octobre 1887 de Rimbaud au Vicomte de Petiteville,
  Consul de France à Beyrouth, (Pléiade p.609) se trouvait au ministère des Affaires étrangères de cette ville. On raconte ici la découverte de cette lettre.


En 1930 Henri Hoppenot découvrait dans un article du Mercure de France : intitulé « nouveaux documents sur Rimbaud » que Marguerite-Yerta Méléra parlait incidemment d’une lettre « du consulat de France en Syrie, qui donnait des renseignements et des conseils pour l’élevage des mulets que Rimbaud -en octobre 1887- songeait à entreprendre ».

Comme il était à cette époque conseiller politique du Haut-Commissariat de la république à Beyrouth, il s’occupa de faire rechercher cette lettre que mentionnait Mme Méléra aux archives du consulat de France au Liban. On la retrouva et on lui confia cette lettre. Cependant il ne la publia que 17 ans plus tard grâce à son ami Georges Blin qui confiait des articles pour une revue de poésie et de littérature, la revue Fontaine


Collection JB.

C’est dans cette revue que la lettre fut publiée avec un fac-similé en 1947.


Collection JB. DR.

Cependant l’autographe disparut pendant longtemps avant de réapparaître curieusement dans une vente à Drouot en 2004 . Elle fut récupérée la même année par les archives du ministère des Affaires étrangères. Elle se trouve actuellement au centre des Archives diplomatiques de Nantes qui nous a donné aimablement l’autorisation de la publier sur ce blog. Dans sa présentation de la lettre Henri Hoppenot écrivait : « Telles quelles, ces lignes n’ajoutent rien à notre connaissance de leur auteur. Est-ce par suggestion que j’y crois percevoir à travers la coulée de la phrase et la résonance de certains mots, l’écho mourant du langage renoncé ? »


Mme Méléra n’a pu connaître l’existence de cette lettre que dans les papiers de  Berrichon qui cependant ne l’avait pas publiée dans sa correspondance. Ce n’était possible qu’avec la réponse du consul de Beyrouth du 3 décembre 1887 qui mentionnait la date de l’envoi de Rimbaud. Le manuscrit de cette lettre du 3 décembre se trouve au musée Rimbaud. 


Pour conclure, sans Mme Méléra, si critiquée pour sa biographie de Rimbaud de 1930, on n’aurait vraisemblablement jamais retrouvé cette lettre.








samedi 6 février 2021

Mise au point sur la photographie mythique de Rimbaud (mis à jour le 7 février)

Dans le documentaire de France 5 que l’on peut revoir, on a présenté une photographie de Rimbaud par Carjat, la plus connue. Il convient de faire une mise au point sur cette question où je pense pouvoir donner des informations utiles.


On ne possède pas l'original de la photographie mythique mais seulement des reproductions.


Voici celle qui a été présentée au cours du documentaire et qui appartient au musée Rimbaud :


DR.

Elle aurait appartenu à Jean Cocteau

Une autre reproduction remarquable se trouve aussi au musée Rimbaud :


DR.


elle porte au dos une attestation d’Isabelle Rimbaud :


DR.

Cette attestation prouve qu’elle a été faite avant la divulgation de ce portrait en 1922 par Berrichon. La soeur de Rimbaud l’avait offerte à Madame Théo Van Rysselberghe dont la fille avait eu un enfant avec André Gide. Ceci explique qu’elle faisait partie des archives de l’auteur de Paludes. La fondation Catherine Gide l’a offerte au musée Rimbaud en 2013 suite à mes recherches. Nous verrons qu’à défaut de l’original c’est la meilleure reproduction connue de la photographie mythique.


Un document capital trouvé dans les archives de Paul Claudel permet de progresser dans la connaissance du visage de Rimbaud. Il s’agit d’une photographie de l’original qui se trouve à la BNF depuis 2015 :


Photo JB. DR.

On aperçoit en bas l’estampille Carjat. À défaut de l’original on a donc une image qui est une référence. On constate que Berrichon n’a pas trop retouché l’image de Rimbaud dans l’édition de 1922, contrairement aux autres photographies qui y figuraient.


Voici l’image que l’on peut obtenir à partir de la reproduction précédente :


DR.


On peut donc à présent faire des comparaisons :


                                      Claudel                                Gide                                          Gid

Dans la photo Gid, une partie de la manche droite du veston est coupée et des taches notamment sur le sourcil gauche apparaissent. La reproduction la plus fidèle à l’original est celle de la fondation Gide.


Mise à jour du 7 févrierOn peut voir de larges extraits inédits de la conférence « Le mystère des visages de Rimbaud » que j’ai donnée le 20 octobre 2015 à Charleville. Il faut rectifier 1868 en 1866 pour la date que je donne de la photo de première communion.