mercredi 23 décembre 2020

Rimbaud et Jacoby


Émile Jacoby est connu pour avoir créé un journal « Le Progrès des Ardennes » dans lequel Rimbaud avait publié sous le pseudonyme de Jean Baudry un article intitulé « Le Rêve de Bismarck » en novembre 1870. De plus Rimbaud fut employé dans ce journal en avril 1871 pour y dépouiller la correspondance. Jacoby est mort l’année suivante à Charleville le 25 juin 1872 comme le montre son acte de décès que j’ai consulté.


Jacoby était aussi photographe à Charleville. Il se trouve que Rimbaud logeait à côté de lui. Jacoby avait son atelier situé au 22 rue Forest et Rimbaud habitait au 20 de la même rue depuis 1866. C’est pour cette raison que des biographes comme Jean-Jacques Lefrère ont pensé que la photographie de première communion des deux frères Rimbaud avait été prise par Jacoby car la première communion de Rimbaud avait eu lieu en mai 1866.


DR. BNF.

Cependant cette attribution a été contestée par Jacques Desse qui l’attribue au photographe Eugène Vassogne. Certains ont été convaincus par cette attribution comme Alain Bardel et David Le Bailly. L’argument principal de Desse repose sur le tapis de sol de la photo de première communion qui serait caractéristique des photographies de Vassogne. Mais l’image qu’il donne pour illustrer son propos n’est pas convaincante car les dessins géométriques ne sont pas identiques. Pour ma part je pense que Jacoby qui habitait à côté de Rimbaud en 1866 est un candidat plus naturel comme photographe.


Vassogne est l’auteur d’un portrait de Vitalie la sœur du poète. Sur cette photo Vitalie a au moins 15 ans. Jacoby était décédé à ce moment là ce qui explique que Madame Rimbaud n’avait pu retourner chez lui.


DR. Musée Rimbaud.
Daté de 1874 par Claude Jeancolas

Jacoby était un passionné de photographie qui écrivait souvent à la Société française de Photographie où il fut admis en 1868. Le grand format et l’excellente qualité du portrait de première communion plaident en faveur de Jacoby.



Avant son arrivée à Charleville Jacoby, qui était instituteur, avait dirigé un établissement d’éducation à Tours et avait découvert vers 1839 un calculateur prodige, jeune pâtre illettré du nom d’Henri Mondeux. Son père l’avait confié à Jacoby qui publia plusieurs monographies sur ce pâtre et l’avait présenté à des savants mathématiciens. Grâce à Jacoby,  Mondeux devint célèbre en son temps. Le traité d’arithmétique publié par Jacoby montre qu’il était bien informé en mathématiques. 

DR. BNF.

Jacoby savait que Rimbaud écrivait des poèmes mais il ne l’a pas, semble-t-il, considéré comme un poète prodige. La femme de Jacoby écrivait des poèmes. Peut-être appréciait-elle ceux de Rimbaud ? On pense que Jacoby avait pu publier Le Dormeur du val en 1870. En tout cas Rimbaud avait toutes les raisons d’apprécier Jacoby qui était ouvertement favorable à la Commune et qui ne s’en cachait pas dans son journal qui fut d’ailleurs censuré par les autorités françaises en 1871. On ne connaît de Jacoby que le portrait qu’en a donné Delahaye : un homme chauve avec une grande barbe blanche. Ajoutons pour conclure que quand il est mort à Charleville il avait 58 ans et sa femme 35 ans. 

Je remercie François Boisjoly pour m’avoir aimablement communiqué ses images des photographies de Jacoby ainsi qu’Hervé Lestang qui m’a donné des informations sur la biographie d’Eugène Vassogne.




mardi 22 décembre 2020

Rimbaud sur France Inter du lundi 21 décembre au jeudi 24 décembre

L'heure Bleue

France Inter du lundi 21 au jeudi 24 de 20H à 21H par Laure Adler

Lundi 21 : Alain Borer

Mardi 22: Yves Bonnefoy (archive 1966) et Pierre Michon

Mercredi 23 :  Patti Smith

Jeudi 24 : Alain Borer, Ernest Pignon-Ernest et Jean-luc Barré

dimanche 13 décembre 2020

Une information probable de Rimbaud publié dans le journal "Le Temps"

Nous avons vu que pendant son séjour au Caire Rimbaud envisageait une carrière de journaliste. Il avait écrit à Paul Bourde pour lui proposer des articles pour Le Temps. Le jeudi 15 décembre 1887 il écrivait à sa famille :

«  J’ai envoyé des articles au Temps, Figaro etc … »


Jean Voellmy qui avait publié la correspondance de Rimbaud à Ilg a suggéré que Rimbaud avait pu envoyer au Temps une information. (Parade Sauvage 11, p.143). Voici cet entrefilet publié dans le Temps du 23 octobre 1887 :



On peut renforcer l’hypothèse de Jean Voelmy. On voit que Rimbaud dans cet entrefilet dénonce le Sultan de Zeilah Abu Baker, ce qui correspond à ce qu’écrivait Rimbaud à son sujet peu de temps après cet entrefilet, le 9 novembre 1887, dans une lettre à Emile de Gaspary :  


« Les ennemis les plus dangereux des Européens en toutes ces occasions sont les Abou Beker, par la facilité qu’ils ont d’approcher l’azzaze et le Roi, pour nous calomnier, dénigrer nos manières, pervertir nos intentions. Aux Bédouins dankalis ils donnent effrontément l’exemple du vol, les conseils d’assassinat et de pillage. L’impunité leur est assurée en tout par l’autorité abyssine, et par l’autorité européenne sur les côtes qu’ils dupent grossièrement l’une et l’autre. Il y a même des Français au Choa qui, pillés en route par Mohamed, et à présent encore en butte à toutes ses intrigues, vous disent néanmoins «  Mohamed c’est un bon garçon! »- Mais les quelques Européens au Choa et au Harar qui connaissent  les mœurs et la politique de ces gens, exécrés par toutes les tribus Issa Dankali, par les Galla et les Hamara, fuient leur approche comme la peste. »


Voici une photographie inédite de ce fameux Abou Beker protégé par le gouvernement français de l’époque : 


DR. Collection J.B.


lundi 30 novembre 2020

Les enseignements du passeport de Rimbaud établi au Caire (mis à jour le 8 décembre 2020)

 

DR.

Le passeport de Rimbaud établi au Caire le 23 septembre 1887 a été reproduit plusieurs fois. On donne ici le fac-similé du catalogue de l'exposition Arthur Rimbaud. Portraits, dessins et manuscrits réalisé en 1991 (p. 84). Ce document qui décrit Rimbaud donne d'autres informations importantes. Ainsi, il y est précisé que le poète est accompagné de son domestique Djami, ce qui lui permettait de passer la frontière avec son maître et qui montre que Rimbaud avait l'intention de voyager avec lui. Les biographes avaient déjà signalé que Djami était arrivé à Massaouah avec Rimbaud, mais ils ont éludé l'importance de sa présence au Caire. 


On sait que Rimbaud avait refusé que Djami l’accompagne en France pour se faire opérer et où pourtant il aurait été très utile pour l'aider à se déplacer. Si j'en crois la notice que j'ai réalisée sur lui dans le Dictionnaire Rimbaud, il avait au plus 19 ans en 1887 et était à son service depuis 1883. On sait aussi que Rimbaud avait manifesté avant de mourrir l'intention de lui faire un legs de 3000 francs, ce qui était une somme importante. On est en droit de penser que Rimbaud considérait Djami plus qu'un simple domestique et qu'il était une présence pour lui comme compagnon de voyage. 


L'autre information que l'on peut relever sur le passeport du Caire est que celui-ci a été établi au vu d'un premier passeport délivré par le Vice-Consul à Massahouah. Nous ne connaissons pas ce document mais grâce à Vincent Malausa nous pouvons publier un document inédit qui est une copie d'un reçu de ce passeport réalisé à Massaouah le 10 août 1887.


DR. Collection Vincent Malausa.

On peut lire sur ce document : Massaouah, et à côté acte de passeport français. Surtout la date du 10 août 1887 ainsi que la signature du Vice-Consul Mercinier. Cela permet de bien préciser la date de départ de Rimbaud de Massaouah.



Vincent Malausa a contribué plusieurs fois sur ce blog en publiant des documents inédits et en ajoutant à cela  à une faculté d’analyse peu commune. On peut par exemple consulter l’article suivant.


Mise à jour du 8 décembre 2020 : le catalogue de la vente du passeport du Caire donne une indication importante qui n'a jamais été reproduite : le passeport a été visé au verso par le vice-consul de France à Suez le 29 septembre 1887." Bon pour se rendre à la Côte orientale d'Afrique par Aden". Ce qui indique que le 29 septembre 1887, Rimbaud était à Suez.



Je remercie Alain Tourneux de m'avoir communiqué cet extrait du catalogue.

lundi 16 novembre 2020

Rimbaud au Caire, un retour à la civilisation (mis à jour le 25 novembre)

Le Caire.DR.


Rimbaud a passé 7 semaines environ au Caire à partir du 20 août 1887. Ce qu’il fit exactement dans cette ville reste aujourd’hui encore mal connu. Le but de cet article est de rappeler les évènements sûrs et de faire des hypothèses sur ce que nous ignorons. C’est après le retour épuisant de Rimbaud qui suit sa vente d’armes à Menelik qu’il décida, pour prendre du repos, d’aller au Caire et d’y reprendre des forces. Selon la lettre du 23 août 1887 à sa famille il donne les raisons de son voyage au Caire : «  Je suis venu ici parce que les chaleurs étaient épouvantables cette année dans la mer Rouge, tout le temps 50° à 60°, et me trouvant très affaibli après 7 années de fatigues  qu’on ne peut s’imaginer et des privations les plus abominables, j’ai pensé que 2 ou 3 mois ici me remettraient, mais c’est encore des frais, car je ne trouve rien à faire ici, et la vie est à l’européenne et assez chère » Puis il ajoute «  figurez-vous que je porte continuellement dans ma ceinture seize mille et quelques cents francs d’or, ça pèse une huitaine de kilos, et ça me flanque la dysenterie »


En réalité l’une des raisons importantes de ce voyage au Caire était de déposer les 16 mille francs d’or, à une agence du crédit lyonnais comme il l’écrit le lendemain à sa mère. Par la même occasion il lui demande de lui envoyer 500 francs, car il ne peut retirer l’argent placé à la banque qui doit y rester au moins six mois. C’est un peu curieux, car il aurait pu penser à garder 500 francs pour lui avant de les placer à la banque. Sa mère lui enverra la somme qu’il retirera au Consulat de France. Dans cette lettre il précise aussi qu’il est forcé d’attendre jusqu’au 15 septembre ( pourquoi ?)


Nous connaissons le registre de l’agence du crédit lyonnais dans laquelle il indique qu’il réside à l’hôtel d’Europe, que sa profession est « employé ». 


Retenons dès à présent que Rimbaud est allé le 23 août au crédit lyonnais sans le dire à sa mère, puis que le 24 il lui dit qu’il a placé l’argent (peut-être le matin). Nous savons que son adresse donnée au crédit lyonnais à cette date est l’hôtel d’Europe. Le 26 août il écrit à Alfred Bardey en donnant comme adresse : « Poste restante, Caire. Jusqu’à fin septembre. » Pas question de l’hôtel d’Europe. Puis nous sommes informés que le 23 septembre il a retiré son passeport au consulat de France. Le 8 octobre il est à Aden. Que s’est-il passé pendant l’intervalle d’un mois environ ?



C’est ici qu’une autre information capitale nous est donnée. Nous savons que le 25 août 1887 paraît le fameux article de Rimbaud du Bosphore Égyptien retrouvé et publié par Jean-Marie Carré  en 1927 qui donne une relation de l’histoire de la récente guerre menée par Ménélik et de sa propre équipée d’Entoto à Harar.  On peut penser qu’il est allé voir Octave Borelli propriétaire du journal aussitôt arrivé au Caire, d’autant plus que dans son numéro du 22 août le Bosphore Égyptien signalait la présence du voyageur : «  Nous croyons savoir que M. Raimbaud (sic) ne prolongera pas son séjour ici et qu’il prend ses dispositions pour aller au Soudan. » Nous connaissons donc assez bien ce qu’il fit du 20 août au 26 août, mais nous n’avons plus aucune lettre de lui jusqu’au 8 octobre où il écrit à sa mère pour lui dire qu’il a bien reçu les 500 francs au Consulat de France.


Le Caire représentait pour Rimbaud un retour  à la civilisation. Il avait passé sept ans entre Aden et Harrar loin des grandes villes européennes, or voici qu’il se trouve dans une ville de 400 000 habitants avec des théâtres, des cafés, des hôtels, des magasins de toutes sortes, le confort de l’eau courante qu’il ne connaissait pas à Harrar. Certes, Le Caire restait une ville marquée par l’orient, mais  la présence française depuis l’expédition d’Égypte par Napoléon  en avait donné aussi un caractère européen par bien des aspects. Rimbaud d’ailleurs le dit à sa mère : « la vie est à l’européenne ».


Paul Bourde.DR.

C’est au Caire que Rimbaud va se souvenir de Paul Bourde dont il avait eu des nouvelles quatre ans auparavant. Bourde avait rencontré Bardey sur un bateau des Messageries Maritimes à la noël de 1883. Il avait appris en discutant avec Bardey que Rimbaud était son ancien condisciple et il savait que Rimbaud commençait à être connu dans un petit cénacle de poètes. On a cru que Rimbaud avait été fâché de faire connaître à Bardey son passé littéraire. Mais pour que Rimbaud pense à écrire à Bourde quatre ans après, il fallait bien que cette nouvelle de la rencontre avec Bardey l’ai marqué. C’est précisément au Caire que Rimbaud écrit à Bourde en lui envoyant ses articles du Bosphore Égyptien pour lui demander de devenir un correspondant international pour le journal Le Temps. Rimbaud a certainement acheté plusieurs exemplaires du Bosphore après sa parution. Voilà donc un fait peu souligné. Il est probable qu’avant d’écrire à Bourde il soit allé consulter les archives du journal Le Temps, probablement à la grande bibliothèque de la ville. Il a pu constater que Paul Bourde était en Corse en 1887, et qu’il publiait des articles à ce propos, qu’il réunira par la suite pour en faire un livre. Certainement ce courrier à Bourde prouve que Rimbaud n’avait pas oublié son passé où il rêvait d’être journaliste. Bourde témoignera dans une lettre à Berrichon qu’il parlait de son passé de poète « avec détachement » dans une lettre qu’il n’a pas conservée. Bourde représentait pour Rimbaud le lien entre son passé de poète et sa nouvelle vie en Afrique.

Son article du Bosphore montre bien qu’il n’avait point perdu le goût de la langue de l’Europe. La poésie n’était plus son sujet, mais son style est très vivant et précis. 


Néanmoins, il n’était pas dans l’esprit de Rimbaud de rester confiné. On voit que depuis le 20 août il n’a pas cessé d’agir : déposer son argent au Crédit lyonnais, aller voir Octave Borelli, écrire très rapidement son article pour le Bosphore, écrire plusieurs lettres, à sa famille pour obtenir de l’argent, écrire à Paul Bourde, aller consulter les archives du Temps. Écrire à Bardey pour renouer avec lui ; le 26 août il écrivait à la Société de Géographie pour demander un financement pour une exploration en Afrique. Il se déplaçait avec son domestique pour demander un passeport  au Consulat de France (on peut se demander  pourquoi Rimbaud avait besoin de son domestique pour son voyage au Caire. )


Rimbaud espérait à ce moment-là une autre vie que celle de commerçant. On voit que ce retour au Caire marque un moment de basculement dans la vie de Rimbaud qui le rapproche de son passé et qui certainement le trouble. Il faut signaler un projet dont on a parlé pour son passage au Caire.

On a pu penser que Rimbaud serait allé à Louxor, car on a retrouvé gravé le patronyme Rimbaud sur un temple. Cela semble peu crédible d’autant plus que Louxor est à 800 km du Caire. On imagine mal un Rimbaud épuisé faire ce long voyage pour admirer les temples de Louxor.  À vrai dire on peut plutôt penser qu’il est allé visiter les souks (ou Bazars) très importants au Caire. N’oublions pas qu’il  avait été commerçant et qu’il devait être curieux de voir les productions des marchands de cette ville.


Où Rimbaud a-t-il logé entre la fin août et le 23 septembre ?  Il a pu être invité à résider chez Octave Borelli qui était connu pour accueillir ses compatriotes de passage. Le fronton d’une de ses maisons portait l’inscription : parva domus, magnas quies ( humble maison, grand repos) ce qui pouvait convenir à Rimbaud qui se disait fatigué. Octave Borelli était un avocat brillant et un notable au Caire. Il fréquentait la belle société, il était mondain. Rimbaud a-t-il rencontré au Caire des compatriotes grâce à Borelli ? Nous n’avons aucun témoignage à ce sujet.


Place Ezbekieh. Dessin. DR. Gallica.

Concernant les endroits où Rimbaud est allé au Caire, on peut affirmer qu’il est allé à la plus grande place de la ville : la place Ezbekieh qui était centrale. Le Bosphore Égyptien marque comme adresse pour ses bureaux : siège de la société : sur L’Ezbekieh, rue El husseiny, Maison Alti, À côté de l’hôtel d’Angleterre. Il existait plusieurs hôtels aux environs comme cet hôtel d’Angleterre, mais aucun hôtel d’Europe n’est mentionné dans les ouvrages qui décrivent Le Caire à cette époque. Il serait intéressant de trouver l’emplacement de cet hôtel. Le  Consulat de France se trouvait à la place Ezbekieh (mis à jour le 25 novembre).


En conclusion, le passage de Rimbaud au Caire n’a pas été simplement un moment de repos. Il n’avait jamais été dans sa nature de ne rien faire. Il multipliait les projets et activités. Ce retour à la civilisation marque un basculement. Il aurait aimé vivre de sa plume. C’était un retour à l’écriture. Il ne reprendra pas son métier de commerçant avant plusieurs mois.

 

dimanche 8 novembre 2020

Rimbaud et Verlaine au Panthéon, arrêt de la polémique.

La polémique sur la panthéonisation de Rimbaud marque un arrêt après un nombre considérable d’articles qui ont été publiés presque chaque jour pendant deux mois. 


On peut comparer cette polémique aux deux autres les plus importantes. Celle de La Chasse spirituelle et celle de la photographie d’Aden. La question était simple dans les deux cas. La Chasse spirituelle imprimée par le Mercure de France était-elle de Rimbaud. Et dans la seconde la photographie représentait-elle Rimbaud. Ces deux polémiques ont pris fin quand on a pu prouver que le texte du Mercure de France n’était pas de Rimbaud et quand on a pu démontrer que la photographie ne représentait pas le poète. La nouvelle polémique est de nature très différente. Elle est beaucoup plus complexe. Pas question ici d’attribuer un texte à Rimbaud ou un portrait à celui-ci. La question est : êtes-vous d’accord pour que Rimbaud et Verlaine entrent au Panthéon ? Le but de cette panthéonisation serait de sacraliser la relation homosexuelle des deux poètes. Les rimbaldiens se sont braqués immédiatement. C’était réduire Rimbaud à une relation qui n’a pas duré et de plus, indépendamment de cela, les écrits et la vie du poète ne correspondent pas à ce qui serait une reconnaissance de la nation. Cette pétition n’aurait eu aucun succès si des ministres de la Culture ne l’avaient pas signée donnant en quelque sorte une autorité à cette idée. Il était nécessaire que les rimbaldiens donnent des arguments sérieux. Ce qui fut fait par une lettre au Président de la République. Une liste importante d’écrivains, de poètes, tous rimbaldiens, a donné leur accord sur le texte de la lettre. Les universitaires qui ont écrit des biographies, des éditions commentées des œuvres de Rimbaud l’ont aussi signée. D’autres ont fait savoir autrement qu’ils trouvaient le projet de panthéonisation absurde. 


Il faut savoir que ce projet est principalement à l’initiative de Frédéric Martel dont beaucoup ont découvert avec surprise sa volonté de réunir Verlaine et Rimbaud pour l’éternité. Ce que Frédéric Martel a réussi c’est qu’il « a déjà relevé, malgré lui, un vrai défi : fédérer les plus grands spécialistes du poète, presque tous vent debout contre ce qu’ils qualifient de « panthéonade » explique le dernier article du Monde sur ce sujet. C’est déjà un exploit car les rimbaldiens sont connus pour ne pas être toujours d’accord entre eux.


Frédéric Martel a réussi à se faire connaître comme rimbaldien alors qu’il était inconnu dans ce domaine, n’ayant jamais été cité dans aucune étude critique sur le poète. Le moyen qu’il a trouvé pour y parvenir est d’écrire une longue préface de la nouvelle édition de la biographie de Rimbaud par Jean-Jacques Lefrère. Il est inutile de faire un commentaire sur ce texte pénible à lire et sans grand intérêt. Je me contenterais de signaler ici que la réédition de la biographie ne comporte pas le remarquable ensemble iconographique de l’ancienne édition Fayard que l’on peut toujours se procurer.



mardi 3 novembre 2020

Verlaine et Rimbaud à Londres, résultat de la vente Christie's.

 

DR.AFP.

La lettre de Regamey où était inséré le dessin représentant Verlaine et Rimbaud à Londres a été vendue chez Christie’s ce jour au prix de 160 000 euros. Voir notre précédent article à ce sujet.

vendredi 23 octobre 2020

Les illuminés de Rimbaud (mis à jour le 25 octobre)

 

DR. Le Monde. Illustration Éric Yankher.


Sous le titre Les illuminés de Rimbaud un article du Monde Magazine paraît le samedi 24 octobre. C’est un article de quatre grandes pages, écrit par Robin Richardot qui a mené une enquête très bien documentée auprès des rimbaldiens dont je fais partie. Mon blog y est cité comme une référence et il a tenu compte d’une longue conversation que j’ai eue avec lui. De nombreux rimbaldiens sont cités comme André Guyaux, Alain Tourneux, Alain Borer, Jean-Baptiste Baronian, dont la plupart on fait l’objet d'articles ou d’entretiens réalisés sur ce blog.


Nous avons mis en tête de notre article la belle illustration d’Éric Yankher.


Mise à jour : Le Monde a mis en ligne le 25 octobre ce même article avec un nouveau titre : Rimbaud au Panthéon, les rimbaldiens se rebellent.


samedi 10 octobre 2020

Une lettre en arabe adressée à Rimbaud révélée dans le Coran ayant appartenu au poète

 

DR. IMA. Cliquer sur l'image.
                                                             

Nous avions signalé le 9 septembre qu’un Coran ayant appartenu à Rimbaud allait être exposé à l’institut du Monde Arabe le 20 septembre. Suite à cette exposition nous avons appris grâce à la conservatrice Mme Olga Andriyanova que ce Coran comportait une lettre inédite écrite en arabe adressée à Rimbaud par l’abban Fârih Kali dont l’existence est attestée par une lettre de Sotiro à Rimbaud du 10  juillet 1891. Sotiro lui apprenait que son Abban Fârih Kali était mort empoisonné par sa femme.  


On peut voir ci-dessus cette lettre et sa transcription avec les explications de Mme Olga Andriyanova.


Hugues Fontaine qui était présent lors de l’exposition a réalisé un beau dossier sur ce sujet.


Note : dans le catalogue de l'exposition Rimbaud de la Bibliothèque Nationale de 1954 sont mentionnés :

450. Coran. Traduction française ayant appartenu à Rimbaud - A Mme Pierre Dufour.

451. Coran manuscrit XIXe s., en provenance du Harrar.-AM. Joseph Tubiana.


samedi 3 octobre 2020

Des rimbaldiens opposés à une panthéonisation abracadabrantesque : Olivier Bivort, Gérard Martin, Steve Murphy, Dominique de Villepin

 


Dominique de Villepin qui a publié naguère : Éloge des voleurs de Feu est un rimbaldien connu. Il vient de publier un important article dans le journal Le Monde dans lequel il s’élève contre la panthéonisation d’Arthur Rimbaud. Rappelons que c’est lui qui avait soufflé à Jacques Chirac le mot abracadabrantesque d’Arthur Rimbaud. Nous avons d’ailleurs appris depuis que Rimbaud n’était pas le premier à avoir utilisé ce terme. Dans son article argumenté l’ancien premier ministre exprime que le débat est loin d’être anodin. « la question d’une éventuelle panthéonisation est loin d’être anecdotique puisqu’en creux se joue la meilleure réponse à apporter aux discours empoisonnés sur l’identité ». Il affirme que « pour Rimbaud, le contresens est total. Pour ce fils du soleil, fulminant contre l’homme blanc et les inepties occidentales qui, à 18 ans, a tourné le dos au Vieux Continent et à la littérature, cette panthéonisation serait une monstruosité ».


Gérard Martin qui fut conservateur pendant trente ans de la bibliothèque de Charleville a exprimé dans un enregistrement peu relayé, que cette panthéonisation n’était pas souhaitable : « je ne pense pas que ce soit une très bonne idée parce que Arthur Rimbaud était quelqu’un de révolté qui se moquait des honneurs, je ne pense pas qu’il ait vraiment sa place au panthéon alors que sa poésie est au panthéon de la littérature mondiale, mais lui en tant que personne je ne suis pas sûr qu’il ait sa place au panthéon » ( voir le second enregistrement )


J’ai déjà signalé un article d’Olivier Bivort contre cette panthéonisation, mais le grand spécialiste de Verlaine éprouve le besoin de faire une mise au point :  « Il ne vient pas à l’esprit de MM. Martel et Cie qu’un homme libre vive aussi sa sexualité librement. Si personne ne songerait à nier que Verlaine et Rimbaud ont entretenu des « amours de tigre », sont-ils pour autant, comme on veut nous le faire croire, des porte-drapeaux de la cause LGBT ? Rien n’est moins sûr. Leur orientation sexuelle suffit-elle à faire d’eux les candidats idéaux à offrir à la reconnaissance de la « patrie » ? Il est légitime de ne pas partager ce point de vue. »


Pour ma part, je ne connais aucun rimbaldien qui soit d’accord avec Frédéric Martel. Il me paraît utile de signaler à cet effet que c’est un fait connu des rimbaldiens que Steve Murphy est opposé au projet de panthéonisation.

samedi 26 septembre 2020

Un dessin d'actualité qui représente Verlaine et Rimbaud

DR. Christie's.

Christie’s a communiqué le 22 septembre un dessin connu de Verlaine et Rimbaud à Londres exécuté par le peintre Regamey, mais on ignorait que ce dessin était inséré dans une lettre que Regamey avait adressée à son frère. Le dessin était reproduit selon le livre de Regamey « Verlaine dessinateur » publié en 1896 soit 24 ans après le dessin original qui figurait dans la lettre. Regamey avait pu récupérer la lettre qu’il avait envoyée à son frère et il avait reproduit son dessin dans « Verlaine dessinateur ». Ce dessin original avait appartenu à la collection Lucien-Scheller. Sa localisation actuelle est inconnue. La lettre est un document exceptionnel, car il donne des précisions inédites qui ne figurent pas dans «Verlaine dessinateur ». Ainsi on ne savait pas que Verlaine et Rimbaud étaient restés trois jours à Londres. Il est plaisant de voir que Regamey trouve Rimbaud hideux. 
Regamey est l’un des rares à avoir reçu un exemplaire de la Saison en enfer de la part de Rimbaud.

La vente est prévue le 3 novembre chez Christie's à Paris. L'estimation est entre 70.000 et 100.000 euros.

mardi 22 septembre 2020

L'avis d'un grand rimbaldien sur la panthéonisation de Verlaine et Rimbaud.( Voir la mise à jour à la fin)


Louis Forestier a établi deux éditions de référence sur Rimbaud. La première aux éditions Gallimard avec une préface de René Char s’intitule : Poésies, Une Saison en enfer, Illuminations. La seconde aux éditions Bouquins donne les œuvres complètes et la correspondance. Pour cet ouvrage, remarquons que c’est chez le même éditeur que la nouvelle édition de la biographie de Jean-Jacques Lefrère a été donnée.

Louis Forestier est un rimbaldien historique. Je pense qu’il est le plus ancien et il a joué un rôle très important dans les études rimbaldiennes. J’ai le plaisir d’être en contact avec lui et nous avons souvent de longues discussions principalement sur la littérature. Tout récemment, je l’ai interrogé sur la question actuelle de la panthéonisation de Rimbaud. Je lui ai demandé son opinion qu’il m’a autorisée à faire savoir.

Voici comment il voit les choses : Il faut d’abord examiner les critères qui permettent d’entrer au Panthéon. Ils n’ont pas changé fondamentalement depuis l’entrée de Victor Hugo au Panthéon en 1885 : « Les restes des grands hommes qui ont mérité la reconnaissance nationale y seront déposés ». 

La question qui s’impose est donc de savoir si Rimbaud et Verlaine méritent la reconnaissance nationale. Cette reconnaissance doit être unanime et incontestée. C’est par exemple le cas de celle de Jean Moulin où plus récemment en 2018 celle de Simone Veil. Il s’agit d’êtres admirables dans leur action et dans leur vie.

Prenons le cas de Rimbaud. Quel service a-t-il rendu à la nation ? Est-ce en vendant des armes au Roi Ménélik ? Rimbaud a toujours été fâché avec sa patrie qu’il a quittée pour une autre contrée où il serait plus libre. Son obsession sur son lit de mort à Marseille était d’y retourner. Le fait que Rimbaud soit un poète de génie n’est pas suffisant pour entrer au panthéon. À l’évidence ce n’est pas une figure nationale. Pour Verlaine, c’est encore pire. C’est un grand poète certes, mais, peut-on donner une reconnaissance nationale à un homme qui battait sa femme, son enfant, qui a tenté de tuer Rimbaud et qui est allé une seconde fois en prison pour avoir menacé sa propre mère ?

Dans ces conditions on voit bien que Rimbaud et Verlaine ne peuvent rentrer au Panthéon. On comprend alors que la question de la sexualité de Rimbaud et Verlaine est hors sujet.

Mise à jour 15H 10,

Louis Forestier m'envoie ce message qu'il souhaite que je reproduise sur mon blog :

 Cher ami,

   Je vous remercie de m’avoir introduit dans votre blog et, pour clore nos bavardages, vous adresse, comme dit Bossuet, 'les restes d’une voix qui tombe et d’une ardeur qui s’éteint '.

   Nous avons beaucoup parlé de Rimbaud ces temps-ci. Notamment des raisons invoquées pour et contre une « panthéonade ». Elles sont diverses, parfois solides, parfois spécieuses, et conduisent à se demander si cette pétition spécifique ne recouvre pas des desseins plus lointains et fort différents.

   Aussi avez-vous raison de rappeler qu’il me semble que la question doit être posée autrement. Vous me faites me demander si l’on peut donner une reconnaissance nationale à un poète qui bat sa femme et tente d’assassiner son amant ou à un autre qui pratique le trafic d' armes. A vrai dire, ce n’est pas le problème.

   Ce qui importe c’est de comprendre ce qu'exige aussi l’entrée au Panthéon : la conscience collective par la nation d’une dette commune à l’égard d’un individu. Hugo, Jean Moulin ou Simone Veil répondent à ce critère.

   Que Rimbaud, et même Verlaine, soient de grands poètes, qu’ils nous inspirent à titre personnel, Madame la Ministre de la culture ou Monsieur Martel l’ont très bien dit. Que La Patrie, l’ensemble des Français (tous les connaissent-ils ?) puissent leur être collectivement reconnaissants à tous deux d'un service éminent et d'une vie tangiblement changée, ce n’est pas sûr. 

   Bien amicalement à vous. » 

Merci

L.F.

dimanche 20 septembre 2020

Débat Alain Borer - Frédéric Martel sur France Culture

Débat Alain Borer - Frédéric Martel sur France Culture émission "signes des temps" du dimanche 20 septembre à 12 heures 45

Mis à jour à 19 H

jeudi 17 septembre 2020

Verlaine et Rimbaud au Panthéon.Cinq arguments contre.

Dans une lettre au Président, des artistes, écrivains, poètes et rimbaldiens donnent cinq arguments contre la Réunion de Verlaine et Rimbaud au Panthéon.

À lire dans " Le Monde" du vendredi 18 septembre.

Pour les abonnés on peut lire la totalité de l'article en ligne.

Je fais partie des signataires de la lettre au Président.

Jacques Bienvenu

dimanche 13 septembre 2020

Rimbaud au Panthéon ?


Le Panthéon sous l'Empire. DR.

Frédéric Martel a fait sensation en proposant récemment de réunir Verlaine et Rimbaud au Panthéon. Cette annonce coïncide avec la publication de la réédition de la biographie de Jean-Jacques Lefrère avec une préface de Frédéric Martel dans laquelle il expose les raisons qui selon lui justifieraient sa proposition.

Une pétition en forme de lettre au Président de la République a été signée par la quasi-totalité des anciens ministres de la Culture et approuvée avec enthousiasme par Roselyne Bachelot l’actuelle ministre de la Culture. Cela donne un poids considérable à cette pétition que l’on peut lire ici

Plusieurs personnalités commencent à s’exprimer en rejetant cette proposition. André Guyaux vient de publier un article en ligne dans lequel il expose les raisons de sa réticence à voir Rimbaud au Panthéon. Alain Tourneux le premier a aussi réagi en exprimant son rejet de la proposition. Jacqueline Tessier Rimbaud, arrière-petite-nièce du poète rejette violemment cette idée. La décision appartient au Président Macron, mais si la famille s’y oppose ce ne sera pas possible. Ce fut le cas pour Albert Camus.

Pour se faire une idée, on peut lire :

Les arguments de Frédéric Martel qui dépense une énergie considérable  

Notre opinion rejoint celles d’André Guyaux, Alain Tourneux et Olivier Bivort.

J.B.

mercredi 9 septembre 2020

L'autre Rimbaud


David Le Bailly vient de publier un livre intitulé « L’autre Rimbaud » qui raconte l’histoire de Frédéric Rimbaud frère du poète (ne pas confondre avec Frédéric Rimbaud le père). Ce qu’on peut d’abord reprocher au livre c’est de mélanger les genres. Le Bailly nous dit que son livre est un roman, mais il le présente comme une biographie. Il précise qu’il a consulté des archives et trouvé des informations inédites, mais il n’y a aucun appareil critique de sorte qu’on ne sait pas si certains éléments dont il parle sont des hypothèses ou le fruit d’une recherche personnelle. Par exemple : Frédéric Rimbaud a-t-il reçu un courrier de son père qui lui aurait demandé des nouvelles de ses frères et sœurs ? Est-il allé voir Verlaine à Coulommes qui lui aurait offert un exemplaire des « Poètes maudits » ? Ces informations seraient précieuses si elles s’avéraient exactes. Le Bailly reproche aux biographes de Rimbaud quand ils parlent de Frédéric des « éléments non vérifiés, des incohérences, des racontars, des souvenirs brumeux ; peu de documents écrits, de pièces en bonne et due forme ». Il va même plus loin dans sa critique : il y voit « un mépris de classe, le dédain des savants de la Sorbonne pour la vie de l’autre Rimbaud, vu comme un moins que rien, un rebut social ». 

Mais, Le Bailly se montre-t-il plus sérieux dans son livre que les biographes qu’il critique ? C’est déjà un problème car il fait des erreurs qui sont patentes. L’auteur rappelle que la photo de la première communion, en couverture du livre et à laquelle il attache une importance primordiale, avait été falsifiée et il précise qu’Isabelle avait signé son crime en écrivant : « je certifie que ce portrait est bien celui de mon frère à l’âge de 11ans. ». Portrait qui venait de la donation André Gide en 2012 au musée Rimbaud et qui faisait suite à des recherches qui m’avaient conduit sur les traces de deux photos Carjat. Le Bailly écrit sur la photographie d’Arthur à la fin de son ouvrage qu’elle a été retouchée par Isabelle en 1910. Or c’est une erreur. C’est Paterne Berrichon qui est à l’origine de la retouche. Voici une autre erreur : Le Bailly écrit qu’Isabelle a supprimé dans la correspondance publiée par Berrichon tous les passages concernant Frédéric. Or ce n’est pas Isabelle mais Berrichon qui a caviardé les lettres. De plus, il est inexact de dire que Frédéric a été supprimé de toutes les lettres. Ainsi dans celle du 15 février 1881 Rimbaud écrit une information importante : « À propos, comment n’avez-vous pas retrouvé le dictionnaire arabe ? Il doit être à la maison cependant. Dites à Frédéric de chercher dans les papiers arabes un cahier intitulé : Plaisanteries, jeux de mots, etc.,en arabe, et il doit y avoir aussi une collection de dialogues, de chansons, ou je ne sais quoi , utile à ceux qui apprennent la langue. S’il y a un ouvrage en arabe envoyez ». Il se trouve en plus que cette lettre est d’actualité car le 20 septembre une exposition à l’institut du monde arabe expose un Coran, dont on avait perdu la trace, ayant appartenu à Rimbaud.

Coran ayant appartenu à Rimbaud. DR IMA.

C’est donc une situation irritante de ne pas savoir à quoi s’en tenir avec les anecdotes de Le Bailly. Cela dit, le récit est intéressant et l’idée était bonne de faire un livre sur le frère de Rimbaud. Il permet de mieux comprendre l’évolution des relations de Frédéric avec sa famille. De notre point de vue, l’auteur aurait mieux fait d'écrire une biographie en précisant ses sources et en indiquant ses hypothèses ou ses certitudes. On peut ajouter que pour les rimbaldiens il est utile car il fait réfléchir.
L’auteur donne tout de même des indications bibliographiques, en particulier il précise que son ouvrage n’aurait pas pu voir le jour sans le travail de Jean-Jacques Lefrère. Il mentionne ainsi une douzaine de références dont notre blog.

Voir une autre critique du livre dans l’article de Frédéric Martel : Un automne avec Rimbaud

dimanche 30 août 2020

Actualité rimbaldienne (mis à jour le 2 septembre)

Voir un long article sur France Culture : Un automne avec Rimbaud qui fait le bilan de l’actualité rimbaldienne récente.

Nouvelle édition du Rimbaud de Jean-Jacques Lefrère, collection Bouquins, Robert Laffont (à paraître le 10 septembre). 

Dans le cadre de l’exposition Rimbaud - Soleillet à Nîmes, Une Saison en Afrique on retiendra les manifestations de septembre :  trois jours avec Rimbaud et Soleillet 10, 11 et 12 septembre. 

Rimbaud d’Arabie ou les aventures d’un poète entre les deux rives de la mer Rouge, Institut du monde arabe, 20 septembre 2020, Paris. (mis à jour le 2 septembre).

samedi 1 août 2020

Dossier Voyelles 5



La dernière étude importante écrite à notre connaissance sur Voyelles est celle de Liesl Yamaguchi intitulée : « Correspondances. La couleur des voyelles chez Lévi-Strauss, Jakobson, Rimbaud et Banville ». C’est un article remarquable et très érudit. L’étude de Levi-Strauss sur Voyelles est très peu connue et méritait cette information. Il serait trop long de rendre compte ici de ce qui concerne Jakobson et Levi-Strauss. Je me contente de signaler un domaine que je connais bien et qui concerne Banville et Rimbaud, sujet sur lequel j’ai travaillé pendant de longues années. Il m’est agréable d’observer que Liesl Yamagushi est informée de mes travaux. 
Voici un extrait de ce son article qui me concerne :
Se pourrait-il que le sonnet « Voyelles » soit impliqué lui aussi dans ce débat au sujet de la rime opposant Rimbaud et Banville, survenu entre l’automne 1870 et l’hiver 1871-1872 ? Les faits historiques, méticuleusement assemblés par Bienvenu, semblent indiquer que c’est bien le cas. Notant les rimes extrêmement riches de « Voyelles », d’ailleurs souvent remarquées par les commentateurs, Bienvenu y voit « une attaque subtile à cet égard contre le petit traité de Banville ». Remettant en cause la proposition de Murat selon laquelle «Voyelles» serait « le vrai manifeste rimbaldien de la rime riche », Bienvenu y voit plutôt « un faux manifeste de la rime riche » : une parodie de la survalorisation de la rime riche chez le grand parnassien. Si Banville affirmait que l’« on n’entend dans un vers que le mot qui est à la rime » et que ce mot seul détermine la « couleur » du vers, observe Bienvenu, Rimbaud semble contredire directement le maître dans ce sonnet dont les rimes offrent :
un jeu caricatural de rimes riches ultras riches, banvillesques, mais qui ne remplit pas le devoir que les mots à la rime devraient accomplir selon Banville. Ce ne sont pas les mots qui riment du sonnet qui expriment les visions du poète, mais surtout les autres placés au début ou au milieu des vers. (Bienvenu, « Intertextualités rimbaldiennes : Banville, Mallarmé, Charles Cros », Parade sauvage 21, 2006, p. 81)
La totalité de l’article publiée dans la revue Parade sauvage 2019, n°30 peut être consultée en ligne sur le site de la revue.

Liesl Mariejensen Yamaguchi (née le 27 février 1984 à Santa Monica, Californie, États - Unis ) est une chercheuse littéraire américaine, enseignante en traduction et traductrice. Liesl Yamaguchi a retraduit en anglais le roman Le Soldat inconnu, publié en 1954 par l'auteur finlandais Väinö Linna. Liesl Yamaguchi a étudié la linguistique générale et le finnois aux États-Unis et en Finlande. Elle est doctorante à la prestigieuse Université de Princeton aux États-Unis. En 2015, elle a travaillé comme professeur d'études de traduction à l'Université de Tampere en Finlande et comme chercheuse doctorante invitée à l'École normale supérieure de Paris.

À suivre