samedi 11 juillet 2015

Je quitte l'Europe, Arthur Rimbaud





Sur le site de Charleville-Mézières, Rimbaud est présenté comme « le plus grand marcheur d'Europe » . C'est un fait qu'avant de s'installer à Aden et Harrar, il va parcourir à pied, utilisant parfois le train ou le bateau, les pays suivants : Belgique, Angleterre, Allemagne, Autriche, Italie, Suède, Hollande. Marseille sera, pour lui, le lieu de plusieurs étapes. On l'y voit pour la première fois dès 1875. Il est vraisemblable qu'il soit allé en Espagne, engagé par les Carlistes. On a plusieurs témoignages sur ce fait un peu ignoré des critiques marxistes. On le retrouve à Marseille en 1878, alors qu'il se dirigeait vers une île grecque qu'il n'atteindra pas. Tombé malade, il fut rapatrié par le consulat de Livourne à Marseille. La ville phocéenne sera surtout pour le poète la porte de l'orient, le passage obligé pour quitter « l'Europe aux anciens parapets » ainsi qu'il est dit dans son plus célèbre poème Bateau ivre : « Je regrette l'Europe aux anciens parapets ! ». À la fin du même poème, il écrit : « Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache »

Chaque voyage est l'occasion d'apprendre une nouvelle langue : l'anglais, l'allemand, l'italien , l'espagnol etc.

Rimbaud préfigure son destin dans la Saison en enfer de 1873 :

«  Ma journée est faite je quitte l'Europe. Je reviendrai avec des membres de fer, la peau sombre, l'oeil furieux : sur mon masque on me jugera d'une race forte. J'aurai de l'or : je serai oisif et brutal, les femmes soignent ces féroces infirmes retour des pays chauds ». Quand on sait qu'il reviendra à Marseille pour se faire amputer et soigner par sa sœur, on est un peu troublé...

En 1878, Rimbaud est chef de chantier dans une carrière à Chypre.

C'est à partir de 1880 qu'il quitte vraiment l'Europe pour Aden au Yemen et Harar en Ethiopie. Il apprend l'arabe, réclame le Coran de son père. Il connaîtra toutes les langues pratiquées en Afrique. Il a su merveilleusement s'adapter à ces pays, et ne connaîtra jamais aucun problème avec les africains dont il préférait la compagnie à celle des occidentaux. Il écrira à sa famille  le 6 mai 1883 :

« je perds le goût pour le climat et les manières de vivre, et même la langue de l'Europe. »

Notons bien qu'il ne dit pas : la langue française.

C'est toujours le mot Europe qui revient dans ses propos.

On ne connait pas de lettres écrites par lui dans une autre langue que le français et il publiera un long article de voyages en 1887 dans un journal du Caire . Il n'avait, en fait, rien oublié de sa langue natale.

Il fera usage de différentes monnaies locales dont le thaler, mais il préfèrera l'or qu'il mettra un temps dans une ceinture pour le placer dans une banque au Caire.

Rimbaud est toujours actuel, on y reviendra pour d'autres événements comme la réforme du collège et le problème des migrations. À l'heure où j'écris ce texte j'ignore quelles seront les suites de la crise grecque qui risque de changer l'Europe et de faire tomber les anciens parapets.

JB


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire